Synthèse du Compte-rendu  d’Intervention

 

Grotte Exsurgence

Des FONTANILLES

 

Commune de PUECHABON  (Hérault)

Du lundi 4 juin au vendredi 8 juin 2001

 

Sommaire 

 

A - Déclenchement de l’intervention

B - Évaluation des conditions d’intervention

C - L’opération de secours

D - Bilan de l’opération

E - Résumé

F - Annexes :

Coupe de la cavité

Schéma explicatif de la découverte du masque

           Lettre de remerciement des CT 34 et conclusions

 

 

                                                Plongeur au bord du siphon               opérateur R BOURRIER

 

 

A – Déclenchement de l’intervention :

  

« Un plongeur spéléo affiche un retard conséquent lors d’une plongée de pointe dans le siphon N° 6 de la grotte exsurgence des FONTANILLES…son compagnon en attente au bord de ce même siphon, après 1 heure  de dépassement du prévisionnel horaire de la pointe, décide de rejoindre le binôme en attente au siphon N°4…Ils ressortent ensemble et donnent l’alerte LUNDI 4 JUIN à 2 h 30 du matin… »

  

  A 3 h 16  déclenchement du Plan Spéléo Secours de l’Hérault par le CODIS 34

 

B - Evaluation des conditions de l’intervention :

La cavité a un développement de 1852 m et se compose de 6 parties noyées et de galeries exondées nécessitant quelques escalades et un portage difficile du matériel de plongée.

       ¨      La victime se trouve dans un siphon profond, le n° 6 , connu jusqu’à –77 mètres…

Ce qui implique des plongées aux mélanges…Peu de plongeurs spéléos maîtrisent cette technique…

 ¨      Il faut franchir 5 siphons importants avant d’atteindre le S6 …ce qui réclame une grosse logistique.

  Devant l’ampleur des moyens à engager, les responsables du Spéléo Secours de l’Hérault sollicitent le Spéléo Secours Français à l’échelon national… lui seul peut recenser tous les plongeurs spéléos aptes à remplir de telles missions…

 Une grosse organisation se met  en place avec les différents corps constitués et une course contre la montre commence…   

 

Responsables de l’opération :

 

COS

 Cdt CARIO  SDIS 34

Lt  CONTRERAS  SDIS 34

Patrick LABADIE  Interface GRIMP

 

 

CTD - CTN

     Régis PINEAU  CTD 34

Bernard TOURTE Chargé de mission SSF

Michel LABAT CTN

 

CTDA

Alain CATALDI        (34)

Paul SZOSTAK         (34)

Michel  SARRAIL     (34)

Philippe RATEL (*)   (34)

Magali.BONNEFOI   (*)  (34)

 Richard VILLEMEJEANNE   (30)

 (*)   Nomination en cours

 

 CONSEILLERS  PLONGEE

Christian DEIT (CTD 66)

Philippe BIGEARD (SSF)

ClaudeTOULOUMDJIAN (FFESSM-FFS)

Frank VASSEUR (FFESSM-FFS)

F. POGGIA (CTN PLONGEE) 

 

 

     MEDECINS

 

B. GAUCHE (SSF)

J. DUKERS (Hyperbare Perpignan)   SDIS 34

 

 

Préparation du matériel devant la remorque du SSH      opérateur : R BOURRIER

 

C –  L’opération de secours :

Deux critères  évidents constituent les paramètres d’élaboration d’une stratégie :

   Urgence de l’intervention

 Difficultés techniques des plongées

 

Les responsables du Spéléo Secours de l’Hérault, en concertation avec le SSF National, programment une montée en puissance des moyens en plongeurs spéléos expérimentés pour assurer des missions de recherche, de soutien et d’assistance…

 

Stratégie adopté :

 ¨      -Activation d’équipes de spéléos pour assurer l’équipement sécurite de la cavité et les différents portages jusqu’au siphon 1

 ¨      -Envoi d’une équipe de recherche dans la zone des –40 mètres du siphon 6 le plus rapidement possible mais dans des conditions optimales de sécurité

 ¨      -Mise en pré-alerte et alerte de plongeurs confirmés de dimension nationale afin d’assurer le soutien des plongeurs engagés, les relèves et la préparation des éventuelles plongées profondes.

 ¨      -Préparation d’une équipe de recherche dans le siphon 6, au delà des 40 mètres de profondeur

¨      -Préparation d’une équipe de recherche en plafond dans le siphon 6.

 ¨      -Constitution de plusieurs équipes de soutien pour assurer la logistique des équipes de   recherche.

 ¨      -Mise en place de T.P.S (transmission par le sol) pour assurer une communication entre les différents points stratégiques et le P.C

 ¨      -Activation d’un médecin –plongeur (spécialiste en baro-traumatismes) pour éventuellement médicaliser la victime au niveau du siphon 6.

 ¨      -Organisation de l’évacuation de la victime dès que son état le permettrait vers un caisson hyperbare.

 ¨      -Mise en œuvre d’un plan de sécurité pour l’évacuation rapide d’un plongeur sauveteur en cas d’accident de décompression.

 

                                           Préparation des plongeurs                                  opérateur R BOURRIER

 

Chronologie des événements importants

 

Dates et heures

Evénements

Lundi 04/06/01

 

03 :16

Alerte au niveau du Spéléo Secours de l’Hérault.

21 :00

Activation d’une équipe de 3 plongeurs Marseillais pour effectuer une recherche dans la zone des –40m du siphon 6. (DOUCHET-GUIS-MORE)

Mardi 05/06/01

 

00 :30

Les plongeurs Marseillais découvrent un indice qui laisse présager que Patrick MUGNIER est vivant et aurait pu se réfugier dans une cloche d’air au plafond du S6. Le masque du disparu est retrouvé attaché soigneusement au bout d’un fil d’Ariane de 4 à 5 m de longueur.

Mercredi 06/06/01

 

13 :30

Patrick MUGNIER est retrouvé vivant par Frank VASSEUR dans une cloche d’air au plafond du S6.

14 :00

Le message parvient à la surface grâce au système de transmission TPS installé au niveau du deuxième siphon.

 

A 14 h 05 environ, Frank VASSEUR parvient à extraire Patrick MUGNIER de la cloche d’air où il s’était réfugié et où il commençait à s’asphyxier en lui faisant franchir un siphon de 120 m de long avec un passage à –20m. Ils le conditionnent dans un point chaud confectionné par Serge GILLY à la sortie du S6.

14 :30

Une nouvelle équipe de plongeurs dans laquelle se trouve le médecin Bernard GAUCHE est automatiquement activée.

 

Jeudi 07/06/01

 

04 :00

Nous recevons une communication TPS depuis le S6. le Médecin est auprès de la victime et commence la médicalisation sur place.

13 :46

L’équipe qui se trouve auprès de la victime (Bernard Gauche, Patrick Bolagno et Michel Guis) décide de commencer l’évacuation en autonomie.  

17 :38

La victime sort de la cavité.

 

Vendredi 08/06/01

 

03 :00

Sortie du dernier plongeur du siphon 1

05 :00

Sortie du dernier sauveteur de la cavité.

14 :00

Fin de l’opération de secours sur le site.

 

Timing des différentes phases :

Opérations

de

à

Durée

Recherche 

Entre l’alerte et la découverte de la victime

   04/06/01

      03 :16

     06/06/01

       13 :30

 

        58 :14

Assistance 

Entre la découverte de la victime et le début de l’évacuation du point chaud

   06/06/01

      13 :30

     07/06/01

       13 :46

 

        24 :16

Evacuation

Entre le début de l’évacuation du point chaud et la sortie de la victime de la cavité

   07/06/01

      13 :46

     07/06/01

       17 :38

 

          3 :52

Repliement

Entre la sortie de la victime et la fin des opérations

   07/06/01

      17 :38

     08/06/01

       14 :00

 

        20 :22

DUREE TOTALE DES OPERATIONS DE SECOURS

  04/06/01

   08/06/01

      106: 44

                                                                                   

 

                                    Opération de "gonflage" des bouteilles              opérateur : R BOURRIER

 

D - Bilan de l’opération:

 Cette opération de secours, certainement la plus complexe jamais mise en œuvre en France comme dans le monde, a été une réussite malgré de nombreuses difficultés à surmonter :

 

-         La victime n’était pas ressortie du siphon. Celui-ci était connu jusqu’à 77 m de profondeur et il y avait peu de chance que la victime ait pu ressortir de l’autre coté. 

-         L’accident de décompression était à craindre car il était parti pour descendre à - 140 m. 

-         Le siphon ne comporte pas de cloches d’air connues à ce jour, où la victime aurait pu se réfugier. 

Toutefois : un plongeur disparu doit être considéré comme vivant tant que le corps n’a pas été retrouvé.

De nombreux cas où des plongeurs en difficulté se sont réfugiés dans des parties encore inconnues des siphons ont été recensés. Il y a quelques années, à l’évent de Coudoulière, dans notre département, un plongeur a été retrouvé vivant après 24 h., dans un siphon réputé sans cloche d’air.

L’opération s’est avérée difficile à cause de plusieurs problèmes majeurs :

          Il faut franchir 5 siphons importants avant de pouvoir atteindre celui où Patrick MUGNIER avait disparu. 3 h environ sont nécessaires pour atteindre le S6.

 -         Pour atteindre la zone profonde où il devait se trouver il fallait utiliser des mélanges gazeux que seuls quelques spécialistes maîtrisent parfaitement en France. (Une quinzaine de personnes)

 -         La turbidité de l’eau (visibilité inférieure à 1 m) était très gênante pour les recherches.

 -         La multiplicité des plongées augmentait les risques de sur-accident.

 En temps normal, il faut plusieurs semaines de préparation pour monter ce genre d’expédition.

 

Malgré toutes ces difficultés, on peut dire que l’opération s’est déroulée de façon remarquable : 

Toutes les plongées ont été menées à bien en toute sécurité. 

L’utilisation de système de Transmission Par le Sol  « Nicola » développé par le Spéléo Secours Français a permis d’obtenir rapidement des informations venant du fond. Ce qui a permis de réduire considérablement la durée de l’opération. 

La victime a pu être médicalisée sur place grâce à la présence d’un médecin anesthésiste réanimateur considéré comme l’un des meilleurs spécialistes en plongée souterraine. 

La bonne coordination entre la Préfecture de l’Hérault (présence sur place du Directeur de cabinet), le Spéléo Secours Français, le SDIS 34, le PGHM d’Oloron Ste Marie, la Gendarmerie, le SAMU et les autorités locales, a prouvé que seules les compétences étaient reconnues sur le site.

Quelques points restent toutefois à améliorer : 

Il y a eu un peu de flottement lors des mises en alerte des sauveteurs, le CODIS 34 ne peut émettre des appels vers les téléphones portables, un CT a du rester chez lui toute la journée afin de lancer des alertes vers les portables des sauveteurs. 

Le SDIS 34, a travers son COS, fait venir des moyens PC sur place dès le départ (6 h) puis les désengage de suite, il revient ensuite à 15 h 50 et est installé sur le site, aucun moyen de liaison ne fonctionnant, nous devons transférer le PC à la mairie et demander des moyens de liaison ; lignes téléphoniques, fax…..

  Le SDIS 34 n’a pas suffisamment pris la mesure de l’ampleur de l’opération au début et les moyens logistiques et de transmissions ont été long à être activés. (PC insuffisants, pas de liaison téléphonique avec l’extérieur au début, obligation de mettre en place un relais radio entre le PC et l’entrée de la cavité).

 Pour la première fois dans l’Hérault, suite à un manque de moyens, la préfecture a été sollicitée. La venue sur place du directeur de cabinet du Préfet de l’Hérault a  permis de faire avancer les choses dans le bon sens en débloquant les moyens demandés.

 Cette opération prouve une fois de plus la nécessité d’une étroite collaboration entre les corps constitués et le Spéléo Secours Français (seule structure actuellement capable de mobiliser et d’organiser les meilleures compétences du territoire en matière de secours souterrain).

 

L’issue heureuse de cette opération nous donne espoir que dans l’avenir cette compétence sera reconnue et affirmée par les autorités dans un souci de réussite et d’efficacité des secours souterrains.

 

 

Bilan rédigé par les Conseillers Techniques du SPELEO SECOURS HERAULT

 

                                            Mise à l'eau des plongeurs                            opérateur : R BOURRIER

 

E - RESUME :
 

Intervention du Spéléo Secours de l’Hérault, à la Grotte-Exsurgence des FONTANILLES (Puechabon -34), du 4 au 8 juin 2001. L’opération avait pour but, la recherche d’un spéléo-plongeur disparu qui n’est pas remonté à la surface du 6ème siphon de la cavité dans les délais prévus. L’alerte a été donnée au CODIS 34 le lundi 4 juin à 02 h 35. La victime est retrouvée vivante le mercredi 6 juin à 13 h 30. La victime sort de la cavité, assistée par les sauveteurs du Spéléo Secours Français, le jeudi 7 juin à 17 h 38. Elle est ensuite prise en charge par le SDIS 34 et est héliportée sur Perpignan pour y subir des examens médicaux et notamment un séjour en caisson de décompression.

 

Au total, 108 intervenants dont 31 plongeurs ont été engagés. L’opération a duré 106 h 44

 

 C’est certainement l’opération la plus complexe de sauvetage en plongée souterraine qui n’ai jamais été menée dans le monde. Celle-ci a mobilisé la plupart des meilleures compétences en plongée souterraine du territoire Français.

 

 

 

Mise en place des T.P.S. (Téléphones par le sol) NICOLA 

 

F - ANNEXES :

 

COUPE DE LA CAVITE

 

 

Schéma explicatif de la découverte du masque :

5h00 du matin : suite au retour de l’équipe de la plongée de moins 40 dans le S6 la suite des opérations sera modifiée

A la côte moins 30 environ : Marc DOUCHET voit le fil d’ariane sectionné de ce fait il raboute son fil personnel et atteint la côte moins 40 où il découvre deux choses :

-   une bouteille de décompression en appui sur la pente avec les détendeurs pendants,

-   un masque type MARES FULL VIEW accroché à un fil de 2 mètres emmêlé lui-même à un fil d’ariane en vrac (Marc fait l’analyse que celui-ci est probablement un fil d’ariane personnel de Patrick MUNIER qui pourrait bien lui avoir servi de fil de recherche dans cette zone.)

 La visibilité est fort mauvaise (1 mètre au maximum) bien que personne n'ait mis le pied dans ce siphon depuis le passage de Patrick.

 Au bilan Dominique VICTORIEN confirme que le masque appartient à Patrick  (à sa connaissance Patrick ne disposait pas de masque de secours). 

La suite des opérations change donc d’orientation. L’idée est émise de décaler la prochaine plongée de pointe au Jeudi 7 juin. Celle-ci s’envisagerait en binôme Marc DOUCHET et BOLAGNO

 

 

 

 

Lettre de remerciement des CT et conclusions

 

SSF34/CTD34                                            

 

          Nous remercions tous les bénévoles du Spéléo Secours Français, de l’Hérault, des départements voisins mais aussi des plus lointains pour leur participation à cette opération exceptionnelle…

          Une fois encore vous avez su faire preuve de compétence, grande technicité, disponibilité et dévouement mais aussi de grandes qualités tant physiques que psychologiques qui vous ont permis d’assumer vos fonctions durant toutes ces longues heures …

 

           Un an s’est maintenant écoulé depuis cette intervention … les 104 participants attendent tous leurs indemnisations…( comme ceux qui ont participé à l’intervention précédant celle-ci à la grotte de Lauzinas …)

 L’explication : notre convention stipule que les intervenants du Spéléo Secours Hérault en cas de réquisitions sont indemnisés par le SDSIS sur la base des indemnités de base des sapeurs pompiers volontaires …

Le Directeur du SDIS ne veut pas payer … les autres interlocuteurs lui renvoient la balle… la convention est claire …

           De nouvelles démarches sont en cours pour faire évoluer ce dossier …

         Conscients des difficultés financières de certains qui ont perdu une semaine entière de salaire d’autres qui ont  engagé beaucoup de frais d’autres encore les deux à la fois … nous espérons voir ce dossier avancer rapidement et nous ne manquerons pas de vous tenir au courant .

 

 

Les Conseillers Techniques du Spéléo Secours Hérault.